Conference:
Journées scientifiques d’Orsay, 2018. Session ‘Variabilités climatiques du Cénozoïque au Quaternaire’, Orsay, France.
Authors:
Séverine Fauquette, Jean-Pierre Suc, Speranta-Maria Popescu, Marie Salpin, Guillaume Suan, Johan Schnyder, François Baudin, Loïc Labrousse.
Abstract:
Le visage actuel de l’océan Arctique s’est ébauché dès le Paléogène avec l’ouverture du bassin eurasien. A l’Eocène, l’océan Arctique était un vaste bassin isolé des autres bassins océaniques et entouré de larges surfaces continentales, la connexion du bassin eurasien avec l’Atlantique Nord se fait au cours du Miocène. Le Paléocène (66 à 56 millions d’années) et le début de l’Eocène (56 à 50 Ma) sont connus comme étant les périodes les plus chaudes du Cénozoïque, avec une phase chaude rapide, le Paleocene-Eocene Thermal Maximum (PETM) à ~57 Ma, et un maximum thermique au début de l’Eocène, le Early Eocene Climatic Optimum (EECO), entre 52 et 50 Ma (Zachos et al., 2001). A partir de 49 Ma, le climat semble être marqué par un refroidissement constant avec, à partir de l’Eocène moyen (~45 Ma), la détection dans les sédiments d’Ice-Rafted Debris (IRD) indiquant la présence de glace sur le pôle (Moran et al., 2006). Différentes données couvrant l’EECO indiquent des températures très élevées (e.g. Pross et al., 2012 ; Sluijs et al., 2006 ; Weijers et al., 2007) mais ces températures ne peuvent être reproduites par les modèles climatiques que s’ils fixent des concentrations de CO2 extrêmement élevées (>4000 ppm), bien au-dessus des valeurs reconstituées à partir des données de terrain (Lunt et al., 2012). L’EECO est donc un intervalle qu’il faut étudier plus précisément afin d’obtenir des reconstitutions climatiques plus fines et de calibrer les modèles climatiques sur des périodes, passées ou futures, où les taux de CO2 sont plus élevés qu’actuellement. Dans ce cadre, deux premières études ont été réalisées sur des sédiments prélevés en affleurement sur les îles de Nouvelle-Sibérie au nord de la côte sibérienne et sur la bordure du bassin de Beaufort-Mackenzie au nord de la côte canadienne. Dans ces études, des analyses géochimiques, palynologiques et des reconstitutions climatiques ont été réalisées (Suan et al., 2017 ; Salpin et al., sous presse). Les assemblages polliniques ont mis en évidence une flore exceptionnellement riche en taxons subtropicaux voire tropicaux. Les estimations climatiques obtenues montrent des températures et des précipitations très élevées pour le début de l’Eocène, en accord avec les fortes proportions en kaolinite dans les sédiments (>40%), et semblent diminuer vers l’Eocène moyen. Les précipitations annuelles élevées impliquent un apport très important dans l’océan Arctique éocène d’eau douce chaude ce qui va élever les températures des eaux de surface, entraînant probablement, parmi d’autres facteurs, le réchauffement de la zone polaire (Whitefield et al., 2015). Par ailleurs, ces conditions climatiques singulières, associées à une circulation océanique restreinte, sont considérées comme les principales causes de l’accumulation de sédiments riches en matière organique au centre du bassin Arctique.
References
- Lunt et al., 2012. Climate of the Past, 8, 1717-1736.
- Moran et al., 2006. Nature, 441, 601-605.
- Pross et al., 2012. Nature, 488, 73-77.
- Salpin et al., sous presse. In ‘Refining the Arctic’, GSA Books.
- Sluijs et al., 2006. Nature, 441, 610-613.
- Suan et al., 2017. Geology.
- Weijers et al., 2007. Earth and Planetary Science Letters, 261, 230-238.
- Whitefield et al., 2015. Ocean Modelling, 88, 1-15.
- Zachos et al., 2001. Science, 292, 686-693.